PROJET AUTOBLOG


Reflets

Site original : Reflets

⇐ retour index

Mise à jour

Mise à jour de la base de données, veuillez patienter...

La France, le monsieur plus de la sécurité biométrique en Europe ?

mardi 13 octobre 2015 à 13:21

france-smart-bordersSi le doute persistait, nous savons désormais quel type de société souhaite le gouvernement français. Une société de la suspicion, du fichage. Le rêve de l’ultra-conservateur Nicolas Sarkozy se met peu à peu en place, par le truchement d’un gouvernement étiqueté à gauche. Paradoxe ?

La loi sur le renseignement instaure la collecte massive de données pour un traitement par des algorithmes. Une violation patente de l’un des piliers de notre démocratie : le secret des correspondances. Les plus rétifs à ce changement de paradigme y voient la manifestation de la transformation du pays en Etat totalitaire. Sur le papier, ce n’est pas complètement faux.

Par ici les données biométriques !

Au niveau européen, la France se démarque également. L’Union européenne voudrait instaurer un système de contrôle aux frontières qui fait appel au traitement des données biométriques. Pour l’instant, le projet ne concernerait que les non-résidents de l’Union européenne. Mais c’était sans compter sur la France. En pointe de la lutte contre les méchants terroristes qui ne manqueront pas d’envahir Paris et plus spécifiquement Radio-France, la délégation française a souhaité que ces contrôles biométriques (ainsi que, bien entendu, le stockage et le traitement de ces données) s’appliquent également aux ressortissants de l’Union européenne.

Un petit détail qui serait passé inaperçu sans la veille de Statewatch. Le document français appelant à l’inclusion des résidents de l’UE dans le projet « smart borders » (on dit frontières intelligentes, pas frontières intrusives) n’est pas public. Statewatch a probablement fait une demande pour l’obtenir (ce que nous avons également fait ce jour).

europe-frontieres

L’aspect sémantique de ce document est intéressant. On y retrouve toute la phraséologie des tenants de la surveillance. Les frontières sont, on l’a vu « intelligentes » et pas intrusives. Ces contrôles biométriques qui incluent les empreintes digitales et l’iris, permettront de « fluidifier » et rendre ainsi plus rapides les passages aux frontières. Cela permettrait également, toujours selon la délégation française, de renforcer le principe même de la libre circulation des personnes. On croirait entendre le directeur commercial d’Amesys qui expliquait qu’en vendant un système de surveillance massive à un terroriste, on lutte contre le terrorisme…

Un festival international sur les robots volants : une sorte de Game of Drones

mardi 13 octobre 2015 à 09:19

FRIFFLe 15 octobre marquera la clôture des soumissions de films pour le « Flying robots international film festival« . Toutes sortes de catégories sont ouvertes, y compris la catégorie « LOL ». C’est dire si cela vaut le coup de participer. Le festival est organisé par Eddie Codel. Ce pionnier de la publication indépendante sur le Net organisait déjà Webzine dans les années 2000.

Informer : un métier compliqué

lundi 12 octobre 2015 à 21:25

Informer-nest-pas-un-delitLe quatrième pouvoir n’est plus ce qu’il était. Sans parler, bien entendu, des journalistes qui se déplacent sur des terrains à risque, informer devient de plus en plus compliqué. Dans un recueil d’expériences vécues, 16 journalistes en donnent des exemples précis. « Informer n’est pas un délit, ensemble contre les nouvelles censures » (Calman-Lévy – 17 euros) est finalement une longue énumération des types de bâtons mis dans les roues du journaliste d’investigation. Les actionnaires, les annonceurs, les politiques, l’Etat, les officines, les communicants, la justice, tout y passe. Au travers d’exemples vécus, les journalistes racontent leur quotidien, la censure plus ou moins efficace et plus ou moins directe qui tente de les museler, les formes qu’elle prend.

C’est un constat très alarmant. Si l’on peut aisément se faire une idée du poids des annonceurs ou des actionnaires, de plus en plus lourd, l’opacité et l’omerta mises en place par les serviteurs de l’Etat face à l’investigation journalistique laisse sans voix. Mathilde Mathieu, de Mediapart livre un récit effrayant de ses difficultés à obtenir des informations sur le train de vie des parlementaires. Elle expose également les sanctions qui s’abattent sur ceux qui ont le malheur d’être simplement soupçonnés d’avoir renseigné un journaliste au sein de l’Assemblée Nationale ou du Sénat.

Les auteurs auraient également pu s’interroger sur le public. Souvent apathique, lassé des révélations en cascade ?

Mathilde Mathieu tire ce constat sur le Parlement : « Il s’est tué littéralement. Car l’antiparlementarisme se nourrit plus du secret, terreau des pires fantasmes, que de l’exposition des dérives individuelles en place publique ».

C’est juste. Mais pour ceux qui lisent Mediapart, ou d’autres enquêtes sur d’autres supports, la réponse des lecteurs devrait-elle vraiment être l’antiparlementarisme ou le développement de théories complotistes, ou plutôt une démarche de demande de comptes ?

« Même pas peur » : le documentaire à voir (vraiment)

vendredi 9 octobre 2015 à 13:56

Reflets a attendu plusieurs jours avant de réfléchir, réagir, analyser les événements du 7 au 9 janvier : le meurtre de 18 personnes  (dont une partie de la rédaction du journal Charlie Hebdo) par trois apprentis djihadistes.

La manifestation du 11 janvier et l’emballement sur les réseaux sociaux d’une foule d’internautes se revendiquant tous d’un unique slogan — le fameux « Je suis Charlie » — ne présumaient pas une suite très favorable à ce drame, largement récupéré par les politiques adeptes de la défense de la liberté d’expression, en façade, mais de la restriction des libertés individuelles et collectives, dans les actes.

Revendiquer la République tout en pointant du doigt les personnes issues d’une origine étrangère, de confession musulmane, accepter que la démocratie française se transforme en société panoptique, brandir la Liberté, la Fraternité tout en distillant la peur et le tout-sécuritaire, est désormais la règle. Ne pas prendre du recul et ne pas réfléchir en profondeur à cet « après-Charlie », totalement contradictoire dans les discours et les injonctions politiques ou médiatiques qu’il véhicule, a été une erreur grave.

Cette erreur est désormais corrigée par un documentaire d’Ana Dumitrescu, qui vient tout juste de sortir, et intitulé « Même pas peur ! ».

C’est ce qu’on appelle un documentaire « salvateur », qui débute au lendemain du 11 janvier 2015 et interroge des chercheurs, universitaires, observateurs de la société, sur la peur induite par le discours politique. « Même pas peur ! »  n’est malheureusement programmé, pour l’heure que dans 5 salles parisiennes uniquement.

« Même pas peur ! » est programmé un peu partout : http:/www.memepaspeur-film.com/actus_files/seances.php (toutes nos excuses pour l’information un peu plus haut regrettant le manque de programmation, extraite d’un site de programmation de salles…)

http://memepaspeur-film.com

Le Safe Harbour prend l’eau – et après?

jeudi 8 octobre 2015 à 17:59

navirenaufrageLa justice européenne vient de rendre un arrêt qui ouvre une nouvelle brèche visiblement préoccupante pour le modèle économique des mastodontes du Big Data. La Cour de justice de l’UE, sise au Luxembourg (CJUE), vient en effet d’invalider un des piliers du libre échange de données personnelles entre les USA et l’Europe. C’est ce cadre juridique, appelé « Safe Harbour », qui a fait les frais de l’arrêt du 6 octobre [cf un résumé de la cour].

Cela fait 15 ans qu’il permet à des entreprises non européennes d’exploiter des données privées de citoyens européens, procédé devenu le cœur de métier des multinationales. En y regardant de plus près, ce « havre de paix » (« sphère de sécurité » selon la traduction de la cour), est presque aussi parlant que la maxime orwellienne « La liberté c’est l’esclavage ». Ce cadre juridique prétend que les législations des Etats signataires du Safe Harbour sont « adéquates » vis à vis des lois européennes de protection des données personnelles, réputées comme les plus exigeantes en la matière. L’arrêt de la cour du Luxembourg met en charpie cette « adéquation » supposée. Même si ça fait 15 ans que ça dure.

C’est un citoyen autrichien, Max Schrems, inquiet du sort que le géant Facebook réservait à ses données, suite aux révélations de Snowden, qui a porté plainte en Irlande, lieu où ses données étaient stockées avant d’être transférées aux USA, plainte qui est parvenue, au gré d’un parcours sinueux, jusqu’aux juges européens. Cela fait de nombreuses années que des doutes sérieux ont été émis sur le faiblesse de la protection d’un tel cadre juridique. Mais aucun gouvernement ne l’a dénoncé, puisque’il a été négocié, à la fin des années 90, par le Commission européenne (CE). C’est la CE qui se prend l’arrêt du 6 octobre en pleine poire:

À cet égard, la Cour rappelle que la Commission était tenue de constater que les États-Unis assurent effectivement, en raison de leur législation interne ou de leurs engagements internationaux, un niveau de protection des droits fondamentaux substantiellement équivalent à celui garanti au sein de l’Union (…). La Cour relève que la Commission n’a pas opéré un tel constat, mais qu’elle s’est bornée à examiner le régime de la sphère de sécurité. En outre, les exigences relatives à la sécurité nationale (…) l’emportent sur le régime de la sphère de sécurité, si bien que les entreprises américaines sont tenues d’écarter, sans limitation, les règles de protection prévues par ce régime, lorsqu’elles entrent en conflit avec de telles exigences. Le régime américain de la sphère de sécurité rend ainsi possible des ingérences, par les autorités publiques américaines, dans les droits fondamentaux des personnes, la décision de la Commission ne faisant état ni de l’existence, aux États-Unis, de règles destinées à limiter ces éventuelles ingérences ni de l’existence d’une protection juridique efficace contre ces ingérences.

La Cour de justice ne fait qu’enfoncer le clou. Elle a déjà envoyé un signal identique il y a dix-huit mois. En avril 2014, la même cour a invalidé une autre mesure clé de la police numérique : la conservation de toutes les données, de connexion et de trafic, qu’un individu laisse derrière lui sur les réseaux. Mesure destinée à pouvoir identifier n’importe qui n’importe quand, pour, bien sur, prévenir le terrorisme ou toute « infraction grave ». C’est la directive de 2006 sur le « rétention des données » qui s’est trouvée, dans un arrêt d’un 8 avril 2014, elle aussi invalidée (arrêt que Reflets.info avait analysé en profondeur à l’époque).

Ce nouvel acte juridique, salué comme il se doit par les ONG, ne doit tout de même pas nous faire rêver. Exactement comme dans le cas de la directive devenue illégale 8 ans après son entrée en vigueur, la condamnation du Safe Harbour n’entraîne aucune conséquence concrète pour le plaignant Max Schrems et ses centaines de millions de congénères. La Cour n’a aucune compétence pour exiger quoique ce soit en matière de pratiques commerciales et n’a pas non plus les moyens d’exiger de l’exécutif européen qu’il prennent immédiatement des mesures pour que l’invalidité du cadre attaqué protège mieux les utilisateurs. En matière juridique, une décision peut pourtant s’imposer au forceps si le « trouble manifeste » pour les personnes concernées – soit à peu près toute la population qui utilise un moyen de communication numérique – est avéré; ce que ne constate donc pas la CJUE. Exactement comme lorsque la directive « rétention des données » a été recalée : aucune donnée stockée abusivement n’a été détruite, et la Cour ne l’a d’ailleurs jamais demandé. Il n’aurait pas été scandaleux que le transfert des données de Facebook vers les USA soit purement et simplement suspendu de manière conservatoire. Rien de tout cela n’a même été envisagé.

Facebook, l’entreprise qui est censée avoir perdu cette bataille judiciaire, ne s’en cache pas : elle s’empresse de ne rien faire, à part juger « impératif que les gouvernements de l’UE et des États-Unis assurent qu’ils continuent de fournir des méthodes fiables pour des transferts légaux de données ». La brèche ouverte par cet arrêt de la CJUE apparait donc aussi efficace qu’un coup de canif dans la coque d’un cuirassé.